[Incarné de broute]Mais
n’allez pas si vite crénom, j’ai un grand blessé à m’ner moi. Ouais il
boîte plus tant qu’ ça mais c’est pas une raison. Puis j’ai… euh … les
braies qui … je suis pas une femme hein, n’oubliez pas …
Mais vous êtes sûre que c’est par là ? Parce que si le couchant est par là moi j’ dirais plutôt qu’on va vers la mer. Non ?
Ben oui je sais qu’on en vient mais on a bifurqué trois fois depuis et
puis ça sent la marée je trouve. Mais non c’est pas mes poissons, sont
tous frais, ils ont moins de quinze jours hé…
Maaaa naaaan je dis pas que vous ne connaissez pas le chemin mais
tout le monde peut se tromper, vous confondez bien un cheval de trait
avec un futur champion de tournois puis d’ailleurs quand vous étiez
dessus tout à l’heure vous n’aviez pas l’air dans votre assiette. Enfin
c’est pas grave, Bayonne c’est peut être très joli à visiter remarquez,
parait qu’il y a des gens bons là bas.
Non mais moi je dis rien, je fais juste remarquer que… hein ?? Comment ça y’a que moi qui parle ??
Bon dans ce cas j’en parlerai à mon cheval. C’est l’occasion ou jamais…
N’est-ce pas mon ami ? Dites-moi mon brave, votre maître vous parle
mais si vous préférez continuer l’analyse du fessier de votre
quadrupédécesseur libre à vous… tssss aucune fierté ces bestioles… Le trottinement de la petite croupe avance de clairières en sous-bois
qui exhalent de capiteuses fragrances de sève ragaillardies à l’éveil
printanier. Le bavard à beau vitupérer ses remarques oiseuses à la
cantonade, les sourires narquois qui accueillent ses invectives
finissent par le convaincre qu’il ferait mieux d’économiser sa salive
et s’emplir pleinement les poumons des effluves boisées et feuillues.
Il comprend bien qu’en voyage, le sédentaire cède en terre
étrangère, ses dents taire il a plutôt intérêt et un discours plus
affable adopter. Les deux sœurs mènent la troupe en échangeant un
regard de temps à autre et rien ne trouble leur concentration.
Voyageuses dans leur élément, les sens aux aguets, instinctives et
animales.
Dax est d’accès aisé et l’arrivée sans encombres confrime que ses
fausses craintes ne sont pas fondées et les voila déjà à bride à bas
filant vers le Beauharnais.
Orthez en première courte étape et courte épate de velours papatte à de
courts sur pattes gardiens de la sacro-sainte intégrité territoriale.
L’un ou l’autre improbable sous fifre se poussent du collet auprès des
voyageurs pour leur signifier qu’il viennent de commettre l’irréparable
erreur de franchir une ligne imaginaire séparant la sphère du pouvoir
d’un Comté à son voisin hier ennemi juré, aujourd’hui ami cordial,
demain félon honni, alors qu’un jour tous deux seront absorbés par un
troisième bien plus fort d’avoir été trop malin pour s’épuiser dans
leurs inutiles turluttes intestinales.
Bill s’en moque comme de sa première botte de paille et leur répond
avec cette courtoisie moqueuse que la plupart des crétins prennent pour
du respect, du moins quand ils comprennent plus de trois mots. Il faut
dire que voyager avec la filleule du duc aide assez.
C’est l’heure des retrouvailles avec sa marraine, qui revient d’il
ne sait où, elle doit en être à son troisième tour complet du royaume.
Puisque son fidèle mais indécrottablement troglodytique filleul a
décidé pour une fois de mettre le nez dehors, elle s’est dépêchée de
venir observer l’exceptionnel phénomène. En vérité, elle a sans doute
également voulu voir l’autre phénomène, à savoir la brune qui,
patiemment, a réussi à le faire sortir de son trou à rats, comme un
fragile coquillage délicatement libéré de sa gangue corallienne. C’est
sans doute cela qui l’impressionne le plus, ayant elle-même renoncé à
lui faire connaître les routes du royaume du bac à sable.
Avant d’ouvrir la porte de la taverne où ils se sont donnés rendez
vous, Bill éprouve cette pointe d’appréhension à l’idée de la
confrontation entre la fidèle marraine et la brunissime qui a
spécialement revêtu son plus beau costume à païenne de peste.
Des deux scènes traditionnelles où soit deux femmes s’étripent,
soit se liguent contre lui et lui rabattent son caquet aucune ne se
pose. La tempérance peut être, la fatigue du voyage probablement, la
surprise, il y a des chances, et puis finalement, on s’en fout de
savoir pourquoi, les retrouvailles ne sont entachées que de tisane et
de bière.
Quelques heures à musarder permettent de constater que les immigrés
champenois sont omniprésents et égaux à eux-mêmes, en excellence pour
les uns, en médiocrité crasse pour les autres.
Bon, Orthez moi de là, j’en ai assez vu.
Le maire de Pau, vieille connaissance, leur réserve un accueil enjoué
et le meunier le retrouve avec plaisir. Pau est trop facile à décliner
en jeu de mots pour que la troupe ne s’y à Tarbes, Tarbes est Pau de
chagrin et est plus attrayante quand on l’a dans le dos mais
certainement pas dans la Pau.
C’est curieux ces comtés qui étouffent par manque de commerce mais qui
sortent foudres et menaces dès que l’on fait mine de vouloir vendre un
poisson.
Bonjour Armagnac, salut à vous ô douaniers accorts et à cris.
Si Bill eut l’occasion de donner son avis sur le nom des villes
traversées, sans doute aurait il fait remarquer que Saint Bertrand
était une erreur de choix. Sein Robert eut été plus judicieux et sans
doute présage d’une avenir radieux dans la confection du bonnet, on
rate bêtement des vocations parfois et il ne leur reste que Liziers
pour pleurer, c’est malin.
L’étape un peu prolongée dans le fief de la poétesse maternante lui
donne arguments à se montrer plus loquace envers les ploucs du cru.
Sous l’affable apparence débonnaire se profile le vieux règlement de
cons auquel Bill fait mine de ne rien comprendre, d’autant plus que la
peste semble soudain frappée de crises d’épipilepsie. Sonne le départ
aux vêpres dominicales, sans autre regret que de n’avoir pu deviser
plus longtemps avec un maire plus affable qu’il n’y parait et moins
abruti que la moyenne.
Ma Foix, l’étape suivante ne mérite autre mention que la promixité
de la frontière languedechienne et en moins de flatulences équestres
qu’il n’en faut pour le dire, les voila a cacaresonne, c’est tout dire
et bien suffisant pour pousser … euh non rien les voila déjà aux
narbonnais absents pour une dernière ligne droite en direction de leur
destination finale dont ils eurent tant envie. Tant envie de Béziers,
où la Valériane qui les attend depuis si longtemps qu'elle a fini par
s'endormir, leur offre porte close et gueule de bois.
Charmant accueil que la peste jugule d’un coup de dague et de tatane.
Les premiers moments en taverne n’augurent qu’une prolongation d’un
ennui déjà bien installé. Mis à part le court défilé d’ex semblant
tenir à se faire connaître en tant que tels, rien de bien consistant.
Bill remarque toutefois une curieuse coutume qui semble réservée à
l’accueil des enfants prodigues, que son flegme d’étranger
affectionnant de conserver l’attitude crétine qui endort l’importun,
feint ne pas remarquer.
La fin de la veillée les conduit aux étages ou la distribution des
couches se fait sous la férule de la brune, et curieuse distribution
hasardeuse où l’absence totale de préméditation la conduit a constater
qu’il ne reste plus qu’une paillasse à partager.
Citation: |
Ben… Mon minotier préféré, va falloir se serrer… |
Surprenant,
je croyais qu’une auberge aussi spacieuse nous permettrait d’autres
choix dans la natte… Mais bon… Je vais pas faire ma mijaurée puis c’est
pas une première…
Vous dormez de quel côté ? Je vous suggère du côté de la porte, au
cas ou votre ami pileux-pileux souhaiterait réitérer son toucher de
fessier… Au fait dites-moi, c’est une tradition du cu.. euh du cru
d’accueillir les dames en leur tâtant le fondement ? Il me semble que
votre ami messire Le Un était bien pressé de vous en faire goûter…
Il s’installe dans sa couche, pensif…
Curieux ces biteriers… enfin moi je dis ça … Rassurez vous je ne tenterai pas l’acrobatie sur la première venue… Dormez bien _________________
Ben quoi?